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Le travail de demain

Work Relations & Talents

Nos suggestions pour une transformation digitale réussie

Les répercussions potentielles des avancées digitales sur le monde du travail sont énormes. Certains vont jusqu’à annoncer la fin de l’emploi humain. Or, exploitée à plein essor, nos entreprises sont convaincues que la digitalisation ne posera pas seulement des défis, mais surtout des opportunités pour l’économie luxembourgeoise et pour ses travailleurs. Grâce à la digitalisation des moyens de communication et de production, les entreprises peuvent en effet organiser les opérations commerciales de manière plus efficace et elles disposent d’un accès plus facile et direct aux marchés internationaux. Combinée aux atouts traditionnels du pays, une pleine exploitation des progrès technologiques contribuera à soutenir durablement les tendances positives du marché du travail des dernières années. Or, pour réussir cette transformation digitale, le cadre réglementaire des relations de travail doit être adapté aux défis et opportunités qui l’accompagnent :

La digitalisation requiert une réglementation proche des entreprises

Il est important que les nouvelles flexibilités possibles et compétitivités gagnées grâce aux avancées digitales ne soient pas entravées par de lourdes législations sociales. Par ailleurs, de telles législations se justifient de moins en moins. Partout en Europe, les entreprises sont exposées à des pénuries de main d’œuvre qualifiée et peinent à recruter les talents dont elles ont besoin, ce qui fait que les salariés gagnent en pouvoir pour négocier des conditions de travail appropriées. Plus que jamais également, les préférences varient fortement d’un travailleur à l’autre. L’un veut travailler à temps partiel, l’autre veut travailler à domicile et le troisième préfère un mélange entre ces deux formes de travail. Comme les lois d’application générale sont le fruit de compromis la plupart du temps, elles ne correspondent souvent ni aux besoins de l’entreprise ni aux souhaits de ses travailleurs. De plus en plus rares sont les entreprises avec un seul modèle d’organisation du travail pour l’ensemble du personnel. Cette diversité prouve bien que les entreprises sont à même de trouver des solutions personnalisées à travers des accords négociés directement avec le personnel. Le dialogue social interne doit donc être développé, afin de permettre aux entreprises et à leurs travailleurs de négocier selon leurs besoins, y compris, le cas échéant, des dérogations au cadre réglementaire.

La digitalisation requiert un encadrement contractuel accommodant

Les employeurs sont de plus en plus souvent obligés de trouver, à très court terme, des compétences hautement spécialisées pour s’adapter aux dernières technologies. Or, les candidats ciblés sont de moins en moins enclins à se lier dans les rigidités d’une relation de travail traditionnelle. A la recherche de flexibilité, ils préfèrent souvent prester leurs services de manière indépendante, notamment à travers des plateformes collaboratives. Plutôt que de restreindre le recours à ces nouvelles formes de travail, il convient de faire en sorte que la relation de travail classique, avec ses garanties en termes de protection sociale, garde toute son attractivité, surtout à la lumière d’une main-d’œuvre de plus en plus qualifiée. Pour permettre aux entreprises de satisfaire aux demandes de cette catégorie de travailleurs, il est nécessaire de leur accorder davantage de libertés dans la conclusion de contrats à durée déterminée ainsi que l’organisation du travail. Une façon pour y parvenir est d’ouvrir plus largement la qualité de cadre supérieur à l’ensemble des personnes disposant de compétences élevées. Une autre façon est de réfléchir à l’introduction d’un contrat semi-indépendant. Par ailleurs, la relation de travail intérimaire doit être promue, notamment en introduisant la possibilité de conclure des CDI combinant des périodes de mission et d’intermission. Comme les plateformes, ce secteur permet de mettre en relation offre et demande de travail, mais il présente l’avantage d’agir dans un cadre réglementaire bien défini.

La digitalisation requiert des conditions de travail personnalisables

La digitalisation offre des nouvelles possibilités de structuration du temps et du lieu de travail permettant de concilier mieux vie privée et professionnelle. Or, faire travailler moins les gens est clairement contreproductif pour maintenir la compétitivité des entreprises et relever les défis de la pénurie de compétences. Il serait donc contreproductif de prévoir une quelconque réduction légale du temps de travail ou d’ajouter des congés y compris au niveau européen. Par ailleurs, les conditions de travail divergent considérablement d’un secteur à l’autre. Les modèles flexibles de travail peuvent convenir à certaines catégories professionnelles mais ne pas être envisageables pour d’autres. De nouvelles obligations générales d’accorder des conditions de travail flexibles risqueraient donc d’entraver sérieusement le bon fonctionnement des entreprises. Pour rester dans le cadre des possibilités opérationnelles, la recherche d’une meilleure conciliation entre vie privée et professionnelle doit se faire à travers des accords d’aménagement de la durée et de l’organisation du travail individuels ou conclus entre partenaires sociaux au niveau de l’entreprise. Ce dialogue pourrait être promu à travers des clauses d’ouverture permettant la conclusion d’accords dérogatoires au cadre légal.

La digitalisation requiert l’enseignement des technologies de demain

Le problème de l’incompatibilité entre les compétences recherchées et celles qui sont enseignées devient toujours plus prononcé. L’éducation doit mettre l’accent sur les compétences scientifiques et technologiques et recourir plus largement à des enseignants détachés par les milieux économiques et industriels afin de pleinement réaliser son rapprochement avec le monde des entreprises destinataires des compétences enseignées. L’utilisation de l’équipement informatique, mais également sa compréhension, son contrôle et sa création, doivent être enseignés dans l’ensemble des cursus et non seulement dans les sections informatiques. Par ailleurs, l’apprentissage sur le lieu de travail et les stages en entreprise doivent être priorisés à tous les niveaux afin de préparer les jeunes au travail et assurer que leurs choix de formation correspondent au marché de l’emploi. Le projet Hello Future, ainsi que d’autres initiatives visant à intéresser les élèves dès le plus jeune âge aux métiers de l’industrie et à l’acquisition de compétences techniques, sont des exemples pertinents. De tels partenariats public-privé sont le bon chemin et doivent être développés, notamment en y incluant les étudiants universitaires. Les entreprises constatent que beaucoup de choix de carrière se font encore à l’université, alors que les étudiants ne se rendent compte des opportunités liés à leur choix d’études qu’au fur et à mesure de celles-ci. La visite de foires étudiantes et de salons universitaires, y compris dans les pays voisins, est donc essentielle afin d’attirer davantage de jeunes talents, et doit être promu à travers un modèle de soutien aux entreprises.

La digitalisation requiert l’intégration de toutes les générations

Combinées à l’augmentation générale de l’espérance de vie, les opportunités de la digitalisation en termes de soulagement du travail physique vont permettre une remise en question de l’âge légal de départ à la retraite. Pour adresser utilement la pénurie de compétences, le maintien en emploi des travailleurs âgés est en outre indispensable. Afin de permettre aux entreprises d’accompagner activement les travailleurs dans le prolongement de leur vie active, une boîte à outils est fournie par l’accord-cadre européen du 8 mars 2017 sur le vieillissement actif et une approche intergénérationnelle. Conçue par et pour les partenaires sociaux, il convient de leur en confier la transposition au niveau national. Ils sont les mieux situés pour définir les besoins concrets des différents secteurs tout en assurant une flexibilité suffisante pour permettre l’adaptation des différents outils aux réalités de chaque entreprise. La formation professionnelle continue est un élément essentiel de cette boîte à outils. Or, pour la mettre à hauteur des défis démographiques, un programme ambitieux d’encadrement et de financement public est indispensable. Compte tenu la vitesse croissante des développements technologiques, il n’est pas possible de garantir l’employabilité des travailleurs tout au long de leur vie et de les maintenir dans l’emploi plus longtemps sans adaptation régulière de leurs compétences. Il convient donc d’encourager les entreprises dans leurs efforts de formation du personnel, les guider à travers l’institution d’une structure d’orientation spécialisée dans l’accompagnent au reskilling/upskilling et mettre à leur disposition des formations courtes et professionnalisantes à hauteur des dernières technologies et équipements professionnels.

La digitalisation ne tolère pas les frontières artificielles

La compétitivité des entreprises dépend largement des compétences de leurs collaborateurs. Face à une pénurie de main-d’œuvre qualifiée, les employeurs doivent bénéficier de procédures accélérées pour rentrer en contact et recruter des profils qualifiés, y compris en provenance des pays tiers. Tout comme les conditions d’entrée, l’environnement fiscal et les charges sociales doivent constituer un avantage compétitif pour les entreprises, de sorte à leur permettre d’attirer facilement les compétences et les talents dont elles ont besoin pour se développer. Or, des efforts sont nécessaires pour maintenir l’attractivité des entreprises vis-à-vis des travailleurs frontaliers qui sont de plus en plus préoccupés par des redressements fiscaux dans leur pays de résidence, ainsi que par les effets de la réforme fiscale au Luxembourg. Un bon équilibre entre la vie privée et la vie professionnelle, avec la possibilité de travailler à domicile, là où c’est approprié et compatible avec le poste occupé, commence en outre à devenir plus important dans leur choix d’emploi qu’un package salarial attrayant. Il ne devrait être toléré plus longtemps que des frontières fiscales purement artificielles entre pays empêchent les salariés de bénéficier des avancées digitales leur permettant de travailler depuis leur lieu de choix. La renégociation des conventions fiscales et de sécurité sociale en matière de travail transfrontalier doit ainsi être une priorité, notamment en créant ensemble avec les pays voisins un régime spécifique promouvant le télétravail frontalier. En l’attente de solutions concrètes, le modèle de soutien aux entreprises pour la mise en place d’immeubles de bureaux partagés près des frontières tel qu’annoncé par le Premier ministre dans sa déclaration du 26 avril 2017 doit être mis en œuvre dans les meilleurs délais. Si nous ne parvenons pas à éliminer les obstacles à la mobilité et au télétravail, la lutte contre la pénurie de talents, tout comme les défis environnementaux et de trafic, ne pourront pas être adressés efficacement.

La digitalisation requiert un régime moderne de protection des données

Dans le cadre de la mise en application du nouveau règlement européen relatif à la protection des données, des opportunités se présentent au Luxembourg pour devenir un centre d’excellence dans le domaine des technologies de l’information et de la communication, ainsi que plus généralement du traitement des données. Une implémentation innovatrice et respectueuse de l’uniformité du cadre européen, accompagnée d’un label de conformité facilitant et sécurisant l’exportation des données, stimulera l’économie et la création d’emplois de qualité. Dans ce contexte, il est indispensable que la Commission nationale pour la protection des données coopère efficacement avec les entreprises et que sa performance soit progressivement augmentée. Au niveau des relations de travail par ailleurs, l’autonomie des partenaires sociaux doit être respectée pour déterminer les règles applicables aux données des salariées et traitées par eux ainsi que la gestion du matériel informatique.

La digitalisation requiert des adaptations en matière de prévention santé-sécurité

Grâce à la digitalisation, beaucoup de tâches lourdes et dangereuses, monotones et répétitives, peuvent être automatisées. Le travail humain devient moins physique et plus qualifié, ce qui permettra de prolonger la vie active et d’alléger les exigences de la médecine du travail. Des solutions aux nouveaux risques tels que stress au travail et disponibilité permanente, devront être recherchées par les partenaires sociaux au niveau de chaque entreprise par une adaptation des politiques internes de gestion des ressources humaines et d’utilisation des outils informatiques. Dans l’encadrement de l’utilisation des outils informatiques, la responsabilité personnelle des travailleurs pour une utilisation responsable de ces instruments à titre privé ne devra toutefois pas être négligée. En outre, les travailleurs en reclassement doivent être réorientés par la formation au lieu d’être retenus dans des entreprises qui ne peuvent pas leur offrir ni poste adapté ni perspective. La procédure actuelle oblige les entreprises à créer des postes dont elles n’ont pas besoin, à des coûts considérables qui risquent d’entraver leur compétitivité, sans cependant la moindre valeur ajoutée pour les personnes concernées par le reclassement.

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